janvier 2008

A l’école des garçons

voir la galerie photo

Ce matin nous avons été perturbés par la violence qui régnait dans cette école située dans un village d’intouchables à 1/2 heure de Pondichéry. Tout commence par le spectacle d’une classe à ciel ouvert ( par manque de place) où le professeur impose sa stature de demi-dieu par le châtiment corporel d’élèves qui ont eu de mauvaises notes. Après une humiliation en règle devant le reste de la classe, il les force à se courber en les tirant par les cheveux et leur assène de véritables coups de poing dans le dos.
Pour nous, petits français élevés à la sauce Dolto (merci Françoise !), cette image est absolument insupportable mais elle semble très courante ici. Les flics aussi sont d’ailleurs munis de matraques longues comme le bras et n’hésitent vraiment pas à s’en servir. On est bien loin du cliché baba d’une Inde rêvée où tout le monde serait pacifiste et non-violent. Ici, comme dans beaucoup d’autres sociétés traditionnelles, la foule et les jeunes, ça se gère à la trique… À cela s’ajoutent les abus d’autorité de petits chefs - incarné ici par la vice principale, un bon gros Dieu à elle toute seule - qui avait décrété que seulement une partie des élèves assisteraient à cette heure de spectacle car les autres devaient réviser leurs examens pour le mois de Mars !!! Vous imaginez 200 jeunes assis à attendre le spectacle et les 300 ou 400 autres collés aux fenêtres. On négocie et finalement, ils descendent… Durant le spectacle, les surveillants font n’importe quoi sous prétexte de corriger certains qui s’agitent et ne font que créer des mouvements de foule irrationnels… Les enfants sont survoltés par le spectacle, la vapeur s’échappe un peu de la cocotte-minute, on lit néanmoins sur leurs visages le bonheur de pouvoir s’échapper le temps d’un éclat de rire ou d’un regard fasciné sous la jupe de Margot.

La journée se poursuit dans un village pêcheurs où nous arrivons pile au milieu de funérailles. Nous restons interdits à regarder la famille du défunt parader… On se dit que ce n’est peut être pas le meilleur moment pour venir jouer… Le doute s’installe. Finalement, le frère du défunt nous dit qu’il faut jouer, le chef du village aussi. Alors, on y va… Dans des conditions très difficiles, une toute petite place où il y a beaucoup de passage et des autocars qui s’arrêtent tous les quarts d’heure. Pourtant, c’était sans doute l’un des plus jolis spectacles depuis le début de cette mission. Comme enfermé dans un écrin, une toute petite boîte à musique et des enfants particulièrement doux et fascinés.

Vincent

Les questions qui brassent.

On est confrontés à deux types de violences, d’une part celle de la super discipline et de l’autre celle des enfants qui veulent tout voir, se lèvent, se déplacent, se rapprochent, parlent, crient, lancent des projectiles ( probablement pas méchamment ) quand on leur demande de faire semblant de jeter quelque chose. C’est la première fois - pour ma part en tous cas - qu’on se sent un peu bizarre après le spectacle, est-ce parce que c’est une école de garçons ? que l’on est en milieu proche urbain ? On a un peu la même sensation que si on avait joué en cité. Les réactions sur les scènes d’amour sont éloquentes. En ce pays où l’on voit très peu de contacts entre femmes et hommes, cette rencontre d’un homme et d’une femme en plein émoi amoureux… qui se découvrent et accordent leurs corps (le tout transcendé par la danse, je vous rassure !) résonne en un trouble charmant…

Je sens Tintin très affecté, très questionné… Étant très empathique, je ne suis pas serein et voudrais essayer de l’alléger de quelque chose. Nous avons à plusieurs une discussion le soir sur notre place, la bonne distance, le fait de speeder beaucoup et peu rencontrer les gens, les aléas de l’organisation avec un partenaire ici en Inde … Enfin de toutes ces questions qui nous brassent quand nous faisons ce genre de mission.

Gabi.


voir la galerie photo

PS1: je ne sais pas si ce genre d’informations parvient jusqu’à Paris mais l’Inde est victime d’une énorme panne d’internet, j’ai donc pu sauver les meubles aujourd’hui en me connectant depuis mon propre téléphone. Je ne sais pas si je pourrais le faire à nouveau… Si vous ne recevez rien pendant quelques jours, vous en connaissez la raison…

PS2: N’hésitez pas à nous laisser vos commentaires, ça fait toujours très plaisir de vous lire. Mes plates excuses au Petit Robert pour les quelques fautes d’orthographe qui doivent se glisser ici ou là… mais le temps me manque pour la relecture.

Dans la peau d’un clown

voir la galerie photo

Je dois vous avouer quelque chose… Je viens d’accepter mon premier rôle de clown et la photo que vous voyez au dessus en est la preuve. Rien de bien reluisant et surtout pas le début d’une vocation, je reste de l’autre côté de l’image.. Non juste une idée qui a germé lors des répétitions dans l’esprit tordu de Doriane alias Rita et Benoit alias Master, nos deux magiciens. Il fallait toute une série de personnages différents pour apparaître et disparaître de derrière le “drapeau magique”. Vous imaginez mon enthousiasme quand Benoit me dit ” ah ouais, un photographe ça peut être drôle et puis je te botte les fesses pour te virer du plateau ! ” …. ” euh, oui… très drôle !!!! ” Finalement, j’accepte en me disant que ça peut être l’occasion d’une belle photo avec tous les regards rivés sur moi… comme si j’étais un clown sur le plateau ! Sauf que jusque là, ça allait trop vite ou il faisait trop sombre pour pouvoir en tirer quelque chose… j’en étais juste pour mes frais d’un à deux coups de pieds par jour mais cette fois c’est différent : vous êtes un clown sur scène.

Après cette école où poussent des arbres à costumes et des papillons bleu ciel, nous avons atterri dans un village de pêcheurs touché par le tsunami de 2005. On n’y sent presque plus les stigmates de la vague mais celles de la misère engendrée ou aggravée oui… et une certaine tristesse qui flotte dans l’air malgré les rires des enfants. Ce fût l’occasion de jolis moments de complicité avant le spectacle.

Vincent

Le temps et l’intimité de Doriane.

Ici, le temps n’a pas la même valeur. 1 heure pour commander et enfin avoir un café et quelques toasts… 45 minutes, le temps prévu pour le spectacle qui dure finalement 1H 15… 30 minutes, le temps pour se rendre au prochain village Dalit ( intouchables )… 15 minutes, le temps d’installer un semblant de loge dans une salle de classe, une cuisine, une cabane… 5 minutes, le temps où l’on est seule par jour… 1 minute, le temps d’être émue par un regard, un sourire, un visage…

Ici, le mot intimité n’existe pas… où que l’on soit, on est jamais seule… même la nuit, les klaxons, les bruits de couloirs, ça brasse. Le tout est d’arriver à se recentrer, à digérer toutes ces images, ces sensations, ces émotions. Être seule au milieu de tout le monde… Être seule au milieu d’un groupe de 12 personnes prendra du temps. Ce soir, en rentrant du restaurant vietnamien ( et oui ! on voulait changer un peu…), Gabi est parti à pied, marcher… Vincent a mangé dans sa chambre… Nous, occidentaux, avons besoin d’une bulle, un espace. Ici, personne ne mange jamais seul. On est une famille, un village, une caste… on est plusieurs. Les familles dorment tous dans la même pièce… comment font-ils ? comment font les couples ? J’essaye de comprendre cette notion de l’individu face à son intime. Nous qui nous protégeons tant, face à l’autre, aux autres. Nous qui sommes tellement préoccupés par notre ego et notre bien-être…

Les journées s’enchaînent vite, deux spectacles par jour. Le temps de rester un peu avec les enfants, les villageois… des fois, le temps d’un repas… et c’est reparti. Et moi, je garde dans le coeur et dans les yeux, ces sourires éclatants, ces visages rayonnants.
” You come back ? You come back ? ” Yes, bien sûr… si on pouvait.

Doriane

voir la galerie photo

Un milliard d’Indiens … et moi et moi et moi

voir la galerie photo

Avez-vous déjà expérimenté la sensation d’être les Rolling Stones ou Lady Di ? Cet étrange phénomène qui fait que tout le monde veut vous serrer la main ? Ce besoin d’être protégé par un cordon de sécurité afin de ne pas finir piétiné d’amour par une foule en délire ? Nous oui et pas plus tard que ce matin… dans une école à 10 km de Pondy, dans un village encore une fois peuplé essentiellement de pêcheurs et d’intouchables. Dès notre arrivé, les gamins sont très chauds, il y a un bruit dans cette école, un bourdonnement permanent… L’attroupement se fait immédiatement autour du montage. On ne peut pas croiser un groupe de dix gamins sans qu’ ils se mettent à hurler en vous faisant des grands signes de la main… surréaliste !

Dans cet Olympia improvisé et à ciel ouvert, le spectacle prends une tout autre dimension devant cette foule de 900 enfants bien alignés et en uniformes… D’un côté, les garçons surexcités et de l’autre, les filles, plus réservées mais qui bouillonnent à l’intérieur et qui ne demandent qu’à laisser sortir la vapeur… Une véritable ambiance de pensionnat comme on en a connu chez nous avec cet océan d’inconnu qui sépare les deux sexes et des surveillants qui mènent tout ce petit monde à la baguette (au sens propre ! ). Nous sommes sidérés de voir la rumeur que déclenche la danse entre Tintin et Margot. Deux corps qui se touchent… pour ces jeunes, l’image est d’un érotisme délicieux !

Le spectacle presque terminé, je me dis intérieurement que contrairement à hier soir, les jeunes ici sont bien cadrés et que le dispersement va être géré dans le calme…. enfin presque ! Bravant les ordres des adultes, les jeunes se lèvent d’un seul coup et se mettent tous à courir pour venir saluer les clowns en loge, les toucher, les remercier… Je vous assure que c’est très impressionnant de voir Mai 68 vous foncer dessus ! Doriane se fait littéralement avalée par la foule… certains garçons en ont, parait il, bien profité pour lui les peloter les fesses et les nichons… Faut bien que ça sorte …

L’après-midi, le montage du second spectacle se passe beaucoup plus calmement à quelques kilomètres de là. Un place couverte de sable rouge dominée par un château d’eau qui lui donne des airs de “Bagdad Café”… des blanchisseurs y travaillent et y font sécher le linge au sol à même la poussière. Le spectacle se déroule très bien devant un plus petit public très à l’écoute… les logements très rudimentaires laissent à penser qu’il s’agit d’un quartier très populaire, des gens peu éduqués… en tous cas, ça marche, ils semblent ravis.

Vincent

Le blues du logisticien.

” Poïte varem… Allons-y ! Oui, moi qui suis fan de l’Inde de longue date (privilège de l’âge !) je me demande souvent dans quelle galère je me suis embarqué. Non content d’avoir paumé tous les papiers (billets de retour, contacts, budget prévisionnel, j’en passe et des pas tristes !), j’ai laissé à PAris une partie du budget prévu pour la mission. Bref, le logisticien d’enfer ! L’enfer depuis, c’est moi qui le vit… Au secours maman, je veux rentrer chez moi ! Nuits blanches à ruminer ma nullité et à voir qu’il faudra bien qu’on fasse la manche si on veut manger en fin de tournée. Heureusement, le spectacle est bon, on pourra toujours gagner quelques roupies et des bananes (courtes et rondes… délicieuses !).

L’envers du décors, c’est qu’avant que tout se fasse, j’entends tout et son contraire. Les indiens, gens adorables et souriants, pratiquent traditionnellement la logistique floue (et pour un logisticien…..!!!!!). Le rendez-vous approximatif et le bricolage génial et douteux. S’il me restait encore des cheveux, je m’en arracherais volontiers quelques poignées.

Et malgré tout ça, l’ambiance de l’équipe, faite d’émotions, d’empathie et d’énergie est telle que chaque jour est meilleur que le précédent. L’Inde magique est au rendez-vous avec ces regards d’enfants que les adultes ont…… et cette poésie qu’on sent partout plus forte que la dureté de la vie. ”

Alain.

note de la rédaction : rassurez-vous ! n’envoyez pas de boîtes de pâté ! n’appelez pas le Quai d’Orsay ! nous avons de quoi manger et récupérer les billets retours.

voir la galerie photo

L’ambiance terrain…

voir la galerie photo

Normalement cette soirée aurait dû s’appeler ” Pondichéry Première ” car il était prévu depuis plus de deux mois de faire une représentation dans la “carte postale” de la ville, près du bord de mer, face à la statue de Gandhi… Étaient également attendus à cette soirée quelques officiels et la presse… Finalement, tout a été annulé… hier… et oui, c’est comme ça ! Franchement rien à faire de la carte postale et des people locaux mais vraiment dommage d’annuler… Il a donc fallu trouver très vite une solution de repli et aller repérer le matin même. Nous nous retrouvons donc non loin de là dans une banlieue très pauvre peuplée de pêcheurs et d’intouchables… et c’est certainement mieux ainsi ! Mais je dois avouer que c’est là que me sont revenus instantanément les quelques souvenirs de ” grosse fatigue ” de la précédente mission. C’est le syndrome des épaules qui font “schplouf !” quand il faut s’activer, monter, gérer les enfants sur un terrain poussiéreux et chauffé à blanc par toute une journée soleil. Heureusement, il commence déjà à décliner…

On se retape avec un thé et l’ombre de nos loges magnifiques : bleu azur et toit ouvrant ! Et c’est reparti ! Gabi sort des loges comme une furie en se prenant (vraiment ?) pour une rock star ! C’est trop drôle ! Les autres clowns sortent et tous les mômes accourent. Tout le monde veut se faire prendre en photo avec eux, une mamie et même les flics ! Comme les gens ont été prévenus au dernier moment, le spectacle démarre forcément devant un tout petit public mais il s’accroît nettement au fur et à mesure et surtout, ils sont très chauds et très réceptifs, ça rigole vraiment beaucoup, jeunes et vieux … À la fin du spectacle, les enfants sont à fond et on se fait littéralement envahir l’arrière du rideau, c’est toujours assez délicat à gérer ce genre de situation, il faut réussir à protéger les quelques accessoires car, sans eux, plus de spectacle… On remballe un peu vite en se disant que demain on s’y prendra différemment mais on est heureux d’avoir passé du temps avec ces gens sur ce terrain perdu.

Vincent

Du rire et des larmes selon Benoit :

” Pas de doutes, on sait pourquoi on est là… quel pays ! quel peuple ! Tous ces enfants… Tous ces sourires. Une misère pleine de couleurs, d’odeurs et de visages accueillants. Ce soir, après le spectacle, un vieil homme aux yeux mouillés et au dos voûté m’a remercié avec tant de sincérité et d’insistance que j’ai failli pleurer. Hier soir, le bonheur et l’excitation des enfants m’ont fait comprendre que j’allais vivre trois semaines de bonheur. Le sourire national me contamine déjà… vivement demain et le reste ! ”

Benoit.

voir la galerie photo

Enfants Rois

voir la galerie photo

Après un dernier filage, nous filons à une demi-heure de bus de Pondichéry, direction la ferme école, une annexe de l’association Volontariat destinée à offrir aux enfants un cadre agréable et verdoyant. Tout se passe comme dans une belle journée à la campagne… Pendant le montage du décor, je m’approche des garçons qui jouent au cricket ( so british ! ), ils rigolent à pleines dents, visiblement ils sont heureux ici. Tout de suite, mon regard se pose sur deux frères d’une beauté rayonnante… Ce sont deux petits gitans qui vivaient dans le campement accolé à la décharge municipale de Pondichéry avant d’être placés ici par leurs parents, incapables de les élever… Comme tous les autres enfants ici présents, leur histoire, leur si courte vie résonne déjà de mots comme misère, maladie, abandon, prostitution… Pas de sensiblerie, juste la réalité, toute crue.

Quand je vois ces deux petits visages si photogéniques, je ne peux m’empêcher de penser aux mini-stars, aux “little miss sunshine” , aux enfants mannequins qui remplissent nos magazines et nos spots publicitaires pour nous vendre des fringues super cool, du saucisson méga-bon et des cornflakes trop sympa… D’un côté, l’opulence, le toujours plus, le rêve, le superflu, le vent… rien. De l’autre, des besoins simples, réels, identifiés, des enfants déjà rescapés - pour l’instant - d’une vie de naufrages, il faudrait si peu pour que ça change… Par projection, je pense à mon gamin de cinq ans. De quoi à besoin un enfant pour être heureux ? Enfin bon, ce qui est sûr , c’est que ce soir, durant notre tout premier spectacle, les enfants ont ri à pleines dents ou restaient interdits, ébahis, la bouche grande ouverte… oubliant sans doute un court instant toute la pesanteur de leur vie… c’est pas grand chose mais c’est sûr… c’est pour ça qu’on est là …

Vincent

Le petit moment de solitude de Margot

” ça y est, je ne sais plus quel jour de la semaine on est, j’ai perdu tout repère du temps. C’est peut-être la fatigue de ces quatre derniers jours… Aujourd’hui, nous avons joué notre première, enfin peut être plutôt une générale… mais c’était le premier public, le premier trac avant de jouer. Je crois que nous avons réussi à faire un spectacle qui va apporter du rire, de la magie, de la poésie et des émotions. Il suffit de regarder les photos des visages des enfants pendant la représentation pour voir comment ils étaient captivés. Bien sûr, il y a des ratages et des problèmes techniques mais pas grand chose à jeter ce qui est plutôt incroyable pour un spectacle que nous avons monté à partir de rien en une semaine.

Si on pouvait toujours en faire autant ? Quelle était notre motivation ? Ce pays, ce peuple qui nous attends les bras ouverts. Oui, c’est nous qui sommes venus pour partager ce que nous savons faire mais il me semble déjà que nous avons beaucoup à apprendre. Depuis, quatre jours ici, je vois des gens qui, avec 10 fois moins, réussissent à faire 10 fois plus… sans rouspéter, rechigner, sans agression ni violence, sans jugement ni mépris… Je me pose des questions… Ce soir, dans la ferme école où nous venons de jouer, nous sommes invités à rester manger. Des visages accueillants et souriants nous entourent, c’est simple, c’est bon, ça fait du bien au coeur…

Voilà, le petit moment de solitude que j’avais pour écrire est terminé, six femmes toutes plus jolies et colorées les unes que les autres viennent d’entrer et parlent autour du téléphone. Ici, il y a du monde partout, ça tchatche un langage que je ne connais point… c’est drôle, ici on n’est jamais seul et c’est peut-être mieux comme ça… le bonheur ça se partage non ? En tous cas, c’est ce que j’ai bien l’intention de faire pendant ces prochaines semaines.”

Margot

voir la galerie photo

Jour de fête ?

Cette journée a commencé par une image très forte… de celles qui ne vous lâchent pas de sitôt. Je marchais à la recherche d’un cyber-café quand je suis tombé sur cette famille de circassiens qui jouaient presque seuls leur numéro face à quelques passants mi-hagards mi-indifférents. Une petite fille de 8 ou 10 ans, perchée sur un fil, fait la funambule sous le regard autoritaire de son chef de père qui bât un rythme lancinant sur sa percussion. En dessous, sa mère tape sans conviction sur un plat métallique. Sur ses genoux, un enfant plus jeune essaye de dormir. On pourrait croire qu’il est mort…

J’ai été hanté par cette vision durant toute la journée. D’autant plus que je les ai recroisés par deux fois en milieu et en fin de journée… ce qui laisse facilement augurer de leur rythme de travail sous ce soleil accablant. Aujourd’hui, c’est la fête nationale, il y a plein de passants dans la rue, c’est bien sûr un bon jour pour faire la manche… Cette image résume selon moi ce pays à la fois fascinant de beauté et terrifiant de dureté. C’est aussi une sorte d’image d’Épinal du saltimbanque maudit, qui vit en marge au bon vouloir de celui qui daignera porter un intérêt à son art… C’est sans doute comme cela que le cirque a vu le jour… le cirque des origines… fascinant et terrifiant. Si elle tombait ? On préfère ne pas y penser…

Lorsque je rejoins ” mes clowns ” au Volontariat Community Center de Pondichéry, je constate que le “fan-club” s’est encore élargi ( surtout celui de Tintin qui a un énorme succès… ça doit être ses rouflaquettes ???). Il y a encore plus d’enfants - tranquillement assis ou totalement survoltés - en train de regarder le spectacle se construire. Ils assistent sans broncher à la même scène répétée quatre ou cinq fois et rigolent autant à chaque fois. Ils portent tous fièrement leurs nez rouges… trop mignons !

Aujourd’hui, le travail des comédiens est avant tout technique : il faut faire fonctionner les illusions, rythmer la course poursuite, caler les entrées et les sorties… Tintin finit la mise au point de son accroche d’acrobatie aérienne. Je pense que ça va scotcher les gamins ! Bref, ça roule pour tout le monde sauf pour Gabi qui voit passer un petit nuage noir au dessus de sa tête. Tout d’abord, ses doutes sur son collègue musicien semblent se confirmer et surtout son piano se met soudain à clignoter de toutes ses lumières et puis … plus rien ! Il va falloir aller le faire réparer ? Possible ou pas ? Alimentation ou câble grillé ? Ou les 2 ? On verra ça demain…

A l’heure où je finis d’écrire ces lignes, la rue de l’hôtel est quasiment vide, abandonnée aux chiens et aux vaches sacrées qui broutent leur 25ème sac en plastique de la journée. Je vais me coucher avec le sentiment qu’aujourd’hui, tout le monde n’était pas à la fête …

Vincent.

LA DÉCONVENUE DE GABI

” La découverte de l’Inde dans le minibus qui nous emmenait le 1er jour de Madras à Pondichéry dans la lumière du soleil levant m’a tout halluciné, tout rempli mes yeux d’images fortes et belles que je me demande s’il me reste de la place… C’était un cinéma permanent dans un travelling sans fin sur cette vie à la fois grouillante, suractive et paisible, un défilé de couleurs, de mouvements, d’animaux ( du chient errant aux boeufs exhibant avec frime leurs cornes peintes classieusement…).

Aujourd’hui, ce matin, on a continué avec Perumal, notre comédien-baron indien, la répétition du spectacle… récapitulant avec lui les scènes où il apparaît pour le libérer cet après-midi: il va à un mariage… Mais il faut que je vous parle d’un souci ou plutôt d’une déconvenue qui m’arrive. Comprenez : on m’avait dit : ” “on va travailler avec 2 artistes indiens, issus de la communauté dalit ( les intouchables ), 1 comédien et 1 musicien… Un percussionniste !!!!!!!!! Moi qui ai toujours vénéré les percussionnistes indiens que j’ai pu croiser ou entendre de Ravi Shankar, Shakti, John McLaughin à la musique populaire du Rajasthan, Gulabi Sapera…. je me faisais une joie ! Pour moi, ces musiciens étaient monté à un ultime degré de le science du rythme et du swing, au pinacle, au summum de l’alliance de l’intelligence au service de l’énergie animale…. bref, des gardiens du temple d’un niveau parmi les plus élevés de la civilisation ! Vous imaginez bien que je me faisais un fête de peut-être capter quelque miettes de leur haute science qui m’aurait éclairé dans le tunnel où je me fourvoie depuis si longtemps…!

HÉLAAAAAAAAAAAAAAAAS !!!!!! Force fût de constater que nous étions tombés sur l’un des indiens les plus ARYTHMIQUES de tout le continent !!!!!!!! Je me disais : choc des cultures… incompréhension de mes rythmes… tension… manque d’ouverture de ma part… mais tout a confirmé mon intuition première : même sur ses propres rythmes, en dansant, en frappant des mains… Les autres indiens arrivaient à sentir et marquer le temps…. Mais bon, contre mauvaise fortune, bon coeur…. nous ferons équipe ensemble au service du spectacle …. ”

Gabi.

voir la galerie photo

les choses se précisent…

Les choses se précisent…..

Maintenant que les présentations sont faites, le vrai travaille commence. Il faut que ça avance car la première est dans deux jours…

Aujourd’hui, il faut régler le problème des accessoires : le rideau de scène est arrivé ( coupé en 3 morceaux au lieu de 2, mais bon il est là !), Margot et Maria testent leur planche à flamenco et claquettes ( un vrai music-hall! ) sous l’oeil ébahi des indiens présents.

Côté répétitions, mise en place du tour de magie humoristique ( avec des gens qui disparaissent et qui apparaissent et qui disparaissent et qui apparaissent …! ) pour le plus grand bonheur du public improvisé qui vient de plus en plus nombreux mettre timidement son nez dans la porte entrouverte… jeunes, vieux, hommes, femmes… Certains plus téméraires viennent tout naturellement s’asseoir comme la voisine d’en face et sa fille Ana qui fait craquer tout le monde avec sa petite robe rouge et sa bouille de petite souris.

Côté musique, il y a encore du boulot… Gabi est un garçon très patient mais il s’arrache un peu les cheveux pour garder ses acolytes en rythme… ça va le faire !

Vincent

Voici à suivre un petit mot de Maria :

” Aujourd’hui déjà le deuxième jour de répétitions… Sans que l’on n’ait rien annoncé, on a de plus en plus de public, les gens du quartier, les enfants, les mamans … Ils viennent dans la salle, ils s’assoient, regardent et souvent rigolent alors que ce n’est qu’une simple répétition… donc ça fait plaisir… très plaisir !

Une petite fille (Ana) que l’on voit depuis hier attrape des fous rires assez contagieux, elle est mignonne comme tout. Quand on sort nos pouces qui font de la lumière rouge et qu’on se les envoie comme si c’était des bisous, elle ne comprend pas… On est tous en train de craquer devant elle … qu’est ce qu’elle est belle !

Voilà c’était une bonne journée de répét… ensuite une petite bière en récompense ( c’est la tradition !) et pour dîner j’ai pris un “poulet mandchouri” et c’était tellement piquant que ça m’a emporté la cervelle ! Bonne nuit.”

Maria.

voir la galerie photo

POST-SCRIPTUM UTILISATION DU BLOG :

pour ceux d’entre vous qui sont inscrits à la newsletter, vous n’avez reçu dans votre boîte que le deuxième article daté du 25/01 car le premier daté du 24/01 a été écrit trop tard pour être posté (voyage, retard, décalage horaire, trouver un cyber-café adéquat… mes excuses sont plates) néanmoins vous pouvez toujours le consulter en allant sur le blog et en cliquant sur la date correspondante sur le petit calendrier à droite…

Dans le vif du sujet…

Le 24 janvier, suite…

À peine sortis de la torpeur d’une courte sieste et quelques boulettes de riz plus tard, tout le monde se retrouve dans cette petite salle commune de l’association Volontariat nichée au coeur d’un quartier plutôt résidentiel de Pondy.

Rencontre et découverte mutuelle avec les comédiens et musiciens indiens qui intégreront le spectacle… On plonge directement dans le vif du sujet, on s’apprend des “trucs de clowns” et des pas de danse pour mettre au point la chorégraphie finale sur un tube local. Dehors, les enfants, attirés par le bruit, tentent de comprendre ce qui se trame ici…

Vincent

Et voici donc la “photo officielle” de la troupe des Clowns Sans Frontières, Inde 2008. De gauche à droite et de bas en haut: Arivazhagan, musicien; Tintin Orsoni, artiste de cirque; Elumalai, comédien; Doriane Moretus, metteur en scène; Perumal, comédien; Maria Monedero, comédienne; Margot Mclaughlin, comédienne; Benoit Blanc, comédien et Gabi Levasseur, musicien.

Voici à suivre un petit mot de Doriane sur cette première journée de travail:

” Nous sommes épuisés et excités à la fois… Aujourd’hui, c’était pour certains les retrouvailles avec l’Inde, les odeurs, les klaxons et les saris chatoyants. Pour d’autres, c’est la découverte ! On ne réalise pas encore très bien qu’on est là, à l’autre bout du monde… après une nuit d’avion, cette aventure s’annonce différente de la précédente (janvier 2006), le choc du tsunami s’est estompé, des villes et des vies se sont reconstruites durant ces deux années.

Et puis pour la première fois, nous allons embarquer deux musiciens et un comédien indiens dans l’équipe. Vérification faite en improvisation, l’un des musiciens s’avère plutôt comédien… Que faire ? Un musicien complètement arythmique demandera de notre part beaucoup de patience et d’imagination mais on décide de tenter l’aventure quand même. Enfin, ce sera surtout Gabi qui va essayer de créer un univers commun. Aujourd’hui, nous avons défriché le terrain dans la joie et la bonne humeur. Demain démarre vraiment ce joli challenge artistique et humain ! Argh… Je m’écroule de fatigue… Bonne nuit. ”

Doriane.

voir la galerie photo

le premier tchaï…

le premier tchaï …

Aujourd’hui c’est la première journée, la longue journée du voyage et la riche journée des premières fois… une journée comme on aimerait en vivre tous les jours… une journée où l’on se réveille trop tôt à Paris et où l’on arrive fourbu à Pondichéry …

On boit notre premier tchaï à peine sortis de l’aéroport de Madras dans un incroyable décor de “design indien”, on fait le plein d’images sur la route, juste de quoi alimenter les rêves à demi éveillés d’une petite sieste irréelle du matin avant de repartir pour une après-midi de répétitions…

voir la galerie photo

ouverture des portes le 24 janvier !

chers amis,

le blog ouvrira ses portes très prochainement

mais vous pouvez d’ores et déjà vous inscrire à la newsletter

en remplissant le petit formulaire ci-contre…

à très vite !

voir la galerie photo