27 janvier 2008

Enfants Rois

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Après un dernier filage, nous filons à une demi-heure de bus de Pondichéry, direction la ferme école, une annexe de l’association Volontariat destinée à offrir aux enfants un cadre agréable et verdoyant. Tout se passe comme dans une belle journée à la campagne… Pendant le montage du décor, je m’approche des garçons qui jouent au cricket ( so british ! ), ils rigolent à pleines dents, visiblement ils sont heureux ici. Tout de suite, mon regard se pose sur deux frères d’une beauté rayonnante… Ce sont deux petits gitans qui vivaient dans le campement accolé à la décharge municipale de Pondichéry avant d’être placés ici par leurs parents, incapables de les élever… Comme tous les autres enfants ici présents, leur histoire, leur si courte vie résonne déjà de mots comme misère, maladie, abandon, prostitution… Pas de sensiblerie, juste la réalité, toute crue.

Quand je vois ces deux petits visages si photogéniques, je ne peux m’empêcher de penser aux mini-stars, aux “little miss sunshine” , aux enfants mannequins qui remplissent nos magazines et nos spots publicitaires pour nous vendre des fringues super cool, du saucisson méga-bon et des cornflakes trop sympa… D’un côté, l’opulence, le toujours plus, le rêve, le superflu, le vent… rien. De l’autre, des besoins simples, réels, identifiés, des enfants déjà rescapés - pour l’instant - d’une vie de naufrages, il faudrait si peu pour que ça change… Par projection, je pense à mon gamin de cinq ans. De quoi à besoin un enfant pour être heureux ? Enfin bon, ce qui est sûr , c’est que ce soir, durant notre tout premier spectacle, les enfants ont ri à pleines dents ou restaient interdits, ébahis, la bouche grande ouverte… oubliant sans doute un court instant toute la pesanteur de leur vie… c’est pas grand chose mais c’est sûr… c’est pour ça qu’on est là …

Vincent

Le petit moment de solitude de Margot

” ça y est, je ne sais plus quel jour de la semaine on est, j’ai perdu tout repère du temps. C’est peut-être la fatigue de ces quatre derniers jours… Aujourd’hui, nous avons joué notre première, enfin peut être plutôt une générale… mais c’était le premier public, le premier trac avant de jouer. Je crois que nous avons réussi à faire un spectacle qui va apporter du rire, de la magie, de la poésie et des émotions. Il suffit de regarder les photos des visages des enfants pendant la représentation pour voir comment ils étaient captivés. Bien sûr, il y a des ratages et des problèmes techniques mais pas grand chose à jeter ce qui est plutôt incroyable pour un spectacle que nous avons monté à partir de rien en une semaine.

Si on pouvait toujours en faire autant ? Quelle était notre motivation ? Ce pays, ce peuple qui nous attends les bras ouverts. Oui, c’est nous qui sommes venus pour partager ce que nous savons faire mais il me semble déjà que nous avons beaucoup à apprendre. Depuis, quatre jours ici, je vois des gens qui, avec 10 fois moins, réussissent à faire 10 fois plus… sans rouspéter, rechigner, sans agression ni violence, sans jugement ni mépris… Je me pose des questions… Ce soir, dans la ferme école où nous venons de jouer, nous sommes invités à rester manger. Des visages accueillants et souriants nous entourent, c’est simple, c’est bon, ça fait du bien au coeur…

Voilà, le petit moment de solitude que j’avais pour écrire est terminé, six femmes toutes plus jolies et colorées les unes que les autres viennent d’entrer et parlent autour du téléphone. Ici, il y a du monde partout, ça tchatche un langage que je ne connais point… c’est drôle, ici on n’est jamais seul et c’est peut-être mieux comme ça… le bonheur ça se partage non ? En tous cas, c’est ce que j’ai bien l’intention de faire pendant ces prochaines semaines.”

Margot

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